L’Assemblée des représentants du peuple (lARP) vient d’accorder, tard dans la soirée de mardi à mercredi, sa confiance au nouveau gouvernement proposé par Hichem Mechichi, le ministre de l’Intérieur sortant et désigné par le président de la République Kaïs Saïed pour former la nouvelle équipe gouvernementale.
Le nouveau gouvernement a été approuvé grâce à 134 votes favorables et 67 contre, sans aucune abstention.
Il compte 28 membres, dont huit femmes, avec 25 ministres et trois secrétaires d’Etat. Cette équipe est, en quasi majorité, composé de personnalités apolitiques principalement issues de la société civile : des directeurs généraux, des experts et universitaires ainsi que de hauts cadres de l’administration et du secteur privé.
Le vote en faveur du gouvernement constituera une sorte de contrat de confiance entre le gouvernement et l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), a souligné Hichem Mechichi.
Un état des lieux inquiétant, 4 indicateurs alarmants
Aujourd’hui, a commenté le nouveau chef du gouvernement tunisien, « le résultat est clair et l’état des lieux se traduit par des chiffres et des indicateurs qui ne sont pas vraiment rassurants ».
« La dette publique s’aggrave, car notre pays est devenu emprunteur dans la limite de 15 milliards de dinars par an, et il est tenu de payer près de 7,5 milliards de dinars en 2020 (un dinar vaut 0,36 dollar).
D’ici la fin de cette année, a révélé M. Mechichi, la valeur totale de la dette sera d’environ 80 milliards de dinars : « nous avons, ainsi, le droit de nous demander ce que nous allons léguer à nos enfants et aux générations futures (…). Il est pareillement déraisonnable de voir le service de la dette publique de 2021 s’approcher de 14 milliards de dinars, soit le double des dépenses de développement, ce qui signifie que l’Etat perd la possibilité de jouer son rôle dans le développement » du pays.
Le deuxième problème est lié à la baisse de la demande des biens de consommation de 21,5% et des denrées alimentaires de 7,5%, avec une baisse significative de l’épargne, « ce qui signifie, a expliqué M. Mechichi, que le citoyen s’est trouvé contraint de changer son comportement de consommation, même pour les biens de première nécessité, et se trouve contraint de puiser dans son épargne pour pouvoir répondre aux exigences de la vie […]. Il s’agit d’une situation dangereuse, compte tenu de ses implications économiques, sociales et sécuritaires ».
Le troisième indicateur concerne le taux d’investissement, qui était d’environ 24% avant 2010. Désormais, en 2020, il ne dépasse pas 13%, pourcentage qui ne permet pas d’atteindre le développement et l’emploi, selon le chef du gouvernement.
Dernier casse-tête pour M. Mechichi et son équipe : le taux de chômage élevé qui dépasse la barre des 15%, « le chiffre alarmant restant encore le chômage des diplômés de l’enseignement supérieur, qui est le double du taux général », a-t-il déploré.
Un nouveau « gouvernement de mission »
Selon Hichem Mechichi, la dégradation de la situation s’explique par l’absence de mécanismes d’exécution des choix et programmes. Cela démontre, à son sens, la validité du choix de personnalités apolitiques capables d’intervenir rapidement et efficacement.
« Le gouvernement sera un gouvernement d’action, de réalisation, d’efficacité et de changement qui cherchera des solutions innovantes, tout en tenant compte des moyens (…) dont dispose le pays », a-t-il estimé, insistant qu’il s’agira d’un « gouvernement de mission ».
Ce dernier mettra en œuvre son programme selon cinq priorités à commencer par le freinage de ce que M. Mechichi qualifie d’hémorragie des finances publiques (renforcer le financement du budget d’Etat, la mobilisation des ressources et le contrôle des des dépenses) puis la réforme du secteur public, la récupération de la confiance des investisseurs, la préservation du pouvoir d’achat du citoyen et finalement la protection des catégories sociales démunies et défavorisées.
Ce gouvernement est le troisième à être débattu par le Parlement tunisien au cours des huit derniers mois : celui de Habib Jemli avait échoué à obtenir un vote de confiance, cédant la place à celui d’Elyes Fakhfakh qui avait réussi à gagner la confiance du Parlement avant de démissionner à la mi-juillet.