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A Blida, le Coronavirus ne suscite aucune crainte

Ghada Hamrouche | 08/03/20 16:03

A Blida, le Coronavirus ne suscite aucune crainte

A Blida, «foyer national » du Coronavirus, l’ambiance, ce samedi 7 mars 2020, est ordinaire dans la ville. Le froid vif de la fin de l’hiver n’empêche pas les blidéens de sortir nombreux dans les marchés et les grandes surfaces. Ici, aucune crainte n’est constatée. Tout le monde connait ou presque la famille B dont certains membres ont été déclarés positifs après analyses et mis en quarantaine à l’hôpital de Boufarik. Ce samedi, dans la rue, on parle avec insistance de R.B, partient atteint du Covid-19, 41 ans, qui s’est enfui du service des maladies infectieuses de l’hôpital sous couvert de la nuit pour prendre une destination inconnue. Salim, qui revend des légumes au Souk de Blida, au centre ville, n’est pas inquiét. « Ils vont sûrement le retrouver. J’ai vu une vidéo sur Facebook sur les conditions d’isolement, on dirait une prison. peut être qu’il a raison de prendre la fuite ! », dit-il, le ton ironique. Devenue virale en quelques heures, la vidéo, postée par une malade, montre les mauvaises conditions de mise en isolement à Boufarik. L’hôpital, qui couvre neuf wilayas, subit de fortes pressions ces derniers jours, son personnel tente de s’adapter à la situation comme il peut alors que le voisinage réclame « le déplacement » de l’établissement. On évoque déjà un manque d’anésthésites dans les services de chirurgie. La confusion entre grippe saisonnière et Coronavirus complique la situation avec l’arrivée quotidienne de dizaines de personnes ayant certains signes cliniques (toux, fièvre, etc). L’Algérie a-t-elle des moyens sanitaires suffisants pour faire face à une épidémie à large échelle? C’est un autre débat. Qu’en est-il de la médecine de crise? Des questions posées à Blida, la région ayant connu déjà, durant l’été 2018, l’épidémie de choléra. A l’époque, la gestion était catastrophique. « Comme si la malédiction s’abattait sur nous », réagit Nafissa, étudiante. « L’université est déserte, personne ne vient aux cours. Même les enseignants ne se déplacent plus à l’université de Soumaa. Même climat à El Affroun », dit-elle. Nafissa s’interroge pourquoi les autorités n’ont pas fermé temporairement les deux campus de Soumaa et d’El Affroun surtout qu’il existe des « cas confirmés » parmi les étudiants qui étaient en contact avec la jeune de la famille B, étudiante elle aussi où la maladie a été constatée au début.

« Pourquoi le stade de Mustapha Tchaker n’est pas fermé? » 

A Top Shop, grande surface située au quartier du 13 mai, au nord de Blida, les familles sont nombreuses à faire des achats. Certaines préparent déjà le mois sacré du Ramadhan, qui débute fin avril 2020, d’où la forte présence des femmes dans le rayon vaiselles et produits alimentaires. Les clientes constatent déjà la sensible hausse des prix. Une seule femme porte un masque protecteur. « Avoir peur du virus? Moi, non. Je n’ai aucune crainte. Je sais qu’il faut respecter certaines règles d’hygiène. Maintenant, li ketbha rabi dji », lance une femme âgée, venue faire du shopping avec ses deux filles. Dans la ville, il n’y a pas de panneaux ou d’affiches alertant sur les mesures de prévention à suivre comme celles d’éviter d’aller vers des endroits confinés à grande fréquentation. « Pourquoi le stade de Mustapha Tchaker n’est pas fermé? », se demande Hocine, retraité, qui suit l’actualité du Coronavirus avec tous les détails. « Les autorités de Blida ne donnent pas l’impression d’être inquiètes par l’évolution de la maladie. Elles ne retiennent pas les leçons du passé », appuie-t-il. Au niveau des pharmacies, la demande sur les masques de protection et les gels hydroalcooliques a augmenté, mais, pas assez pour provoquer la pénurie. Les masques sont plus « populaires » que les gels. Au Lyçée Ibn Rochd, au centre ville, à peine quelques dizaines d’élèves portent les masques, perçu comme « une nouvelle mode » !

« Soldat caché » !

A Blida, « les théoriciens du complot » reprennent aussi du poil de la bête, convaincu que le Coronavirus est « une invention » », « une création de laboratoires », « un soldat caché des maitres du monde »…Ils citent souvent des vidéos vues sur les réseaux sociaux, des textes lus quelque part sur la toile, évoquent « un savant » russe qui aurait accusé les Etats Unis d’avoir « fabriqué » le virus pour « affaiblir la Chine et l’Iran »…Dans ce café du centre ville de Blida, les discussions sont animées. « Il a plu hier. C’est bon, tout est nettoyé. Plus de virus ! Ne les croyez pas, ils vous mentent », lance Rahim. « Oui, mais tu oublies que le virus résiste au froid, pas à la chaleur », reprend Sofiane, son ami. « Pourquoi, confinent-ils les malades à Boufarik et pas à Chréa où il y a un hôpital fermé? », relance interrogatif Ahmed. Des questions à n’en plus en finir à Blida, une ville livrée à une léthargie chronique depuis plusieurs années. Une ville qui, malgré son héritage culturel et historique, n’apparait sur les écrans qu’à l’occassion de matchs de football ou…d’épidémies