L’affaire Djamila Bentouis illustre une fois de plus la sévère répression qui s’abat sur les voix dissidentes en Algérie. Cette franco-algérienne sexagénaire et mère de trois enfants a été incarcérée pour avoir simplement exprimé par le chant son soutien au Hirak.
Le 3 mars 2024, à l’issue d’une comparution devant le parquet de Dar El Beida, Mme Bentouis a été placée en détention provisoire par le juge d’instruction, une décision confirmée le 13 mars par la chambre d’accusation malgré l’appel interjeté par ses avocats. Elle est actuellement détenue à la prison de Koléa.
Cette incarcération fait suite aux poursuites engagées à son encontre sur la base de l’article 87 bis du code pénal algérien, dispositions rédigées dans des termes particulièrement vagues et extensibles. On lui reproche en substance son “appartenance à une organisation terroriste”, “l’atteinte à la sécurité et l’unité nationales” ainsi que l’“incitation à l’attroupement non-armé”.
Cette kyrielle d’inculpations sévères repose sur une bien mince assise : les paroles d’une chanson composée et interprétée par Djamila Bentouis lors des manifestations pro-Hirak. Un réquisitoire alarmant contre la liberté d’expression artistique en Algérie.
L’artiste n’avait pourtant nullement l’intention belliqueuse lorsqu’elle était rentrée au pays le 25 février, mais le simple désir d’assister aux derniers instants de sa mère mourante. Cependant, dès son arrivée, elle avait été appréhendée et longuement interrogée par les services de sécurité, privée de ses documents et empêchée d’assister aux obsèques.
Quelques jours plus tard, convoquée à la police judiciaire, elle avait subi un véritable marathon d’auditions focalisées sur son engagement au sein du Hirak et sa chanson polémique, dépeinte comme séditieuse par les autorités. Désormais, c’est derrière les barreaux que cette militante devra désormais exprimer son art.