Pour Mohamed Mebarki, spécialiste de la géopolitique sahélienne, le Soudan constitue désormais un enjeu stratégique incontournable pour l’Algérie. Un rapprochement et un engagement accrus d’Alger sont indispensables pour préserver la stabilité régionale et lutter efficacement contre la menace que représente la milice janjawids de Hemetti dans cette zone névralgique.
La raison principale réside dans le conflit armé meurtrier qui déchire actuellement ce pays charnière du Sahel. Celui-ci oppose les deux principales figures des autorités transitoires : le général Abdel Fattah al-Burhan, chef de l’armée régulière, et son ex-allié Mohamed Hemetti, leader des milices janjawids redoutées. “L’essor du camp de Hemetti risquerait d’ouvrir la voie aux groupes armés radicaux et de leur permettre d’essaimer dans toute la région”, prévient l’analyste.
Cette crise soudanaise menace aussi de déstabiliser davantage la Libye voisine en confortant la position du maréchal Khalifa Haftar, “adversaire potentiel d’Alger sur le Sahara occidental”. Une victoire de Hemetti “assoirait l’emprise régionale des Emirats arabes unis, son parrain, remettant en cause l’influence algérienne”, souligne M. Mebarki.
“Cette guerre fratricide fait peser de lourdes menaces sécuritaires et stratégiques sur l’ensemble du Sahel, raison pour laquelle Alger doit soutenir résolument al-Burhan face à Hemetti afin d’affaiblir Haftar et les milices radicales”, insiste le spécialiste.
Il préconise donc que “l’Algérie resserre d’urgence ses liens avec l’Egypte, principal soutien de Burhan, tout en prodiguant son expertise pour former et encadrer l’armée soudanaise, gage de stabilisation”.
“Un engagement accru à Khartoum permettrait à l’Algérie d’influer sur le rétablissement de la paix, d’endiguer la menace djihadiste dans la région et de contenir les visées hégémoniques des Emirats qui la défient”, analyse l’expert.
Pour Mohamed Mebarki, “accompagner la transition démocratique au Soudan relève désormais d’un enjeu stratégique majeur pour Alger en termes de sécurité régionale, de lutte antiterroriste et de défense des intérêts nationaux”. “L’Algérie ne saurait tolérer à ses portes les foyers d’instabilité et l’obscurantisme prônés par les milices et leurs parrains étrangers”, conclut-il.