Il y a cinq mois, en janvier 2024, une trentaine de personnalités d’envergure nationale, issues des milieux médiatiques, littéraires et artistiques, lançaient un appel solennel au président Abdelmadjid Tebboune pour réclamer la grâce du journaliste emprisonné Ihsane El Kadi.
Publiée le 13 janvier dans les colonnes du quotidien El Watan, cette missive intervenait après l’épuisement de toutes les voies de recours judiciaires pour M. El Kadi, condamné six mois plus tôt à sept ans de prison dont cinq ans ferme. Parmi ses signataires figuraient notamment la moudjahida Louisette Ighilahriz, les écrivains Yasmina Khadra, Maissa Bey, et Kaouther Adimi, les scientifiques Elias Zerhouni et Noureddine Melikechi, les économistes Raouf Boucekkine et Nour Meddahi, des réalisateurs tels que Merzak Allouache et Bachir Derrais, ainsi que des journalistes réputés comme Ali Djerri et Hafid Derradji.
Dans leur plaidoyer, ces personnalités saluaient le « parcours brillant » d’Ihsane El Kadi, véritable « figure de proue » du journalisme algérien. Elles dénonçaient par la même occasion le « poids considérable » que cette affaire fait peser sur la famille du journaliste, mais aussi sur l’image internationale de l’Algérie.
La condamnation du journaliste, poursuivi pour « réception de fonds de l’étranger à des fins de propagande », avait en effet suscité une vague de critiques de la part d’organisations de défense de la presse et des droits de l’homme. Ses avocats n’avaient eu de cesse de contester ces accusations, parlant d’un procès à connotation politique.
Face à cette situation, les signataires en appelaient aux « prérogatives constitutionnelles » du président Tebboune, seul à même de « mettre fin à cette pénible situation ». « Nous espérons que vous userez de vos prérogatives constitutionnelles pour libérer Ihsane El Kadi, ainsi que d’autres détenus d’opinion et leur permettre de passer la nouvelle année auprès de leurs familles », plaidaient-ils.
Cette mobilisation démontrait l’inquiétude croissante au sein de la société civile algérienne quant au respect des libertés fondamentales dans le pays. Une grâce présidentielle pour El Kadi constituerait un geste fort en faveur de la liberté d’expression, enjeu crucial pour l’image démocratique de l’Algérie.
Si cette initiative n’a pas encore connu de suite favorable, elle aura au moins permis de remettre ce dossier sensible sur le devant de la scène, témoignant de la détermination d’une partie de l’élite intellectuelle à défendre les droits humains sur le sol algérien.