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Algérie : le projet sur les pensions alimentaires, une réponse efficace ?

Radio M | 07/12/23 11:12

Algérie : le projet sur les pensions alimentaires, une réponse efficace ?

Sur le papier, ce filet de sécurité financier octroie donc une garantie supplémentaire aux parents vulnérables, en attendant que la machine administrative se mette en branle contre les réfractaires. Pour autant, l’efficacité d’un tel système reste suspendue à une série d’inconnues.

Présenté cette semaine devant les députés algériens, le projet de loi visant à garantir le paiement des pensions alimentaires aux parents divorcés et à leurs enfants se veut une réponse concrète à une problématique sociale récurrente. Le texte, porté par le ministère de la Justice, a le mérite de poser sur la table un sujet sensible, dans un pays où trop de mères célibataires se retrouvent livrées à elles-mêmes. Mais derrière la volonté politique affichée, de nombreuses questions subsistent sur sa mise en œuvre pratique et son efficacité réelle pour endiguer le fléau des pensions impayées.

Sur le principe, le dispositif proposé est relativement simple. Face aux situations -malheureusement fréquentes- où le débiteur (en général le père) refuse ou est insolvable, l’État avance les sommes dues aux bénéficiaires, avant de tenter de se refinancer auprès du mauvais payeur via diverses procédures administratives et judiciaires, pouvant aller jusqu’à la saisie des salaires ou des comptes bancaires. 

Sur le papier, ce filet de sécurité financier octroie donc une garantie supplémentaire aux parents vulnérables, en attendant que la machine administrative se mette en branle contre les réfractaires. Pour autant, l’efficacité d’un tel système reste suspendue à une série d’inconnues.

D’abord se pose la question du financement. Car si l’État va devoir faire l’avance initiale des pensions impayées sur ses propres deniers, rien ne dit que les procédures de recouvrement assureront un retour sur investissement satisfaisant. Le risque est donc grand de voir le dispositif dangereusement grevé par des impayés à répétition, pesant sur les comptes publics. 

Par ailleurs, on peut s’interroger sur les capacités des autorités à mettre en œuvre des procédures contraignantes dans un contexte économique dégradé, où le travail informel et la précarité financière se développent. Entre un appareil administratif limité et des justiciables potentiellement insolvables, la machine risque de rapidement gripper ou tenue en échec.

Au final, à défaut d’un traitement en profondeur des causes socio-culturelles du mal, ce projet pourrait ainsi n’apporter qu’un soulagement temporaire à celles et ceux qui en ont le plus besoin. La réalité du terrain commande donc une application prudente, avec des moyens dédiés à la hauteur des ambitions affichées.