« Les autorités algériennes doivent mettre fin aux poursuites illégales à l’encontre du journaliste Khaled Drareni, fondateur du site d’information Casbah Tribune, correspondant de la chaîne de télévision française TV 5 Monde et représentant de Reporters sans frontières (RSF) en Algérie », a écrit Amnesty international dans un communiqué, rendu public ce jeudi 30 avril 2020. L’appel est lancé à quelques jours de la célébration de la Journée mondiale de la liberté de la presse qui coïncide avec le 3 mai de chaque année. L’ONG de défense des droits humains, basée à Londres, envisage de lancer, le même jour, une campagne « plus large» pour demander aux sympathisants et aux journalistes du monde entier de « faire preuve de solidarité » et appeler les autorités algériennes à « mettre fin aux restrictions injustifiées imposées aux journalistes et aux médias indépendants en Algérie ». « Les autorités doivent immédiatement et sans condition libérer Khaled Drareni et mettre fin à ces poursuites scandaleuses. Il est puni simplement pour avoir osé faire son travail journalistique de façon indépendante et courageuse. Le journalisme ne devrait jamais être un crime punissable », a soutenu Heba Morayef, directrice Moyen Orient et Afrique du Nord à Amnesty International. L’ONG souligne qu’au plus fort de la pandémie de COVID-19, la Journée mondiale de la liberté de la presse devrait rappeler de façon pressante aux autorités que « le journalisme, la liberté d’expression et la liberté de réunion pacifique doivent être respectés en tout temps». Pour rappel, les services de sécurité ont arrêté Khaled Drareni à Alger le 7 mars 2020 alors qu’il couvrait une manifestation du Hirak. Libéré le 10 mars 2020 après une mobilisation de ses confrères, qui ont manifesté devant le tribunal de Sidi M’Hamed, à Alger, le journaliste a été placé sous contrôle judiciaire, mais la police l’a de nouveau arrêté le 27 mars 2020. Détenu à la prison de Koléa, à l’ouest d’Alger, le reporter est accusé « d’ incitation à un rassemblement non armé » et de « porter atteinte à l’intégrité du territoire national ». « Ce qui pourrait conduire à dix ans de prison simplement pour ses reportages en tant que journaliste couvrant les manifestations du Hirak. Drareni a fait des reportages importants sur les manifestations du Hirak et a exposé la répression du gouvernement sur la liberté d’expression et de réunion en Algérie à travers ses vidéos et photos mises en ligne. Il a vivement critiqué la façon dont les autorités ont traité les revendications du mouvement, les qualifiant de superficielles », souligne Amnesty international.
Censure de médias électroniques
L’ONG revient sur le blocage de l’accès à Maghreb Émergent et Radio M Post. Elle rappelle que le le ministre de la Communication, Ammar Belhimer, a admis, le 15 avril 2020 que les autorités, « sans notification préalable », avaient bloqué ces deux médias indépendants en ligne dans l’attente de « nouvelles poursuites » contre son directeur pour « diffamation et insulte » contre le président Abdelmadjid Tebboune. Amnesty parle aussi du site d’information Interlignes qui a affirmé avoir également été censuré puisqu’il était inaccessible depuis le 19 avril 2020 aux adresses IP algériennes. Ce site nie l’affirmation du ministre de la Communication selon laquelle les administrateurs sont à l’origine de l’indisponibilité du site Internet en Algérie, tout en étant disponible pour les adresses IP étrangères. Amnesty International a récemment appelé les autorités à mettre fin aux poursuites contre les militants, manifestants et journalistes du Hirak « détenus uniquement pour avoir exprimé leur point de vue en ligne et hors ligne et/ou appelé à un changement démocratique ». L’organisation a averti qu’en arrêtant et en emprisonnant les militants, les autorités mettaient également en danger leur santé étant donné les risques d’une épidémie de COVID 19 dans les prisons et les lieux de détention.