La situation en Libye est de plus en plus inquiétante après la décision de Khalifa Haftar, annoncée jeudi 12 décembre, de mener une nouvelle offensive militaire, qualifiée de « décisive », sur Tripoli. L’autoproclamé chef de l’armée libyenne a parlé de « l’heure zéro » qui serait arrivée pour occuper la capitale libyenne en pénétrant complètement dans la ville. « C’est l’heure de lancer l’assaut final sur la capitale qu’attend nos concitoyens à Tripoli avec impatience depuis que les terroristes aient occupé les lieux. C’est devenu le fief des criminels qui sèment la terreur par la force des armes et qui usent des moyens de l’Etat pour détourner les richesses des libyens » a déclaré Khalifa Haftar, habillé en tenue militaire, dans un discours télévisé. Depuis cette annonce, les événements s’accélèrent en Libye où « une guerre internationale » semble se préparer. Il y a d’abord la fermeture de l’ambassade de Libye au Caire qui a annoncé, sur sa page Facebook, l’arrêt de ses services « jusqu’à nouvel ordre » pour « des raisons de sécurité ». La mission diplomatique aurait subi des actes de violences, selon le GNA, le gouvernement d’entente nationale de Fayez Al Sarraj, reconnu par la communauté internationale depuis les Accords de Skhirat en 2015. L’ambassade du Caire représente le GNA. Or, Le Caire, qui a toujours soutenu Khalifa Haftar, vient de prendre clairement ses distances avec le gouvernement d’Al Sarraj. Le président égyptien Abdelfattah Al Sissi a critiqué ce gouvernement estimant qu’il est otage des « milices terroristes à Tripoli » et qu’il n’est pas « libre de ses décisions ». Déclarations faites après les attaques de Belgacem Debrez, membre du Haut Conseil de l’Etat, accusant l’Egypte de vouloir renverser le gouvernement de Tripoli et d’imposer sa domination à la Libye. «Notre sécurité est ouvertement menacée par la situation actuelle en Libye. Il fallait qu’on intervienne directement en Libye et nous en avons les capacités. Mais, nous n’avons pas fait cela par respect à la situation de la Libye et pour maintenir la relation de fraternité avec le peuple libyen », a déclaré le président égyptien plaidant pour le retour de « l’Etat national » en Libye, mais également en Syrie.
Al Sarraj compte sur l’appui d’Ankara
Fayez Al Sarraj a visité, dimanche 15 décembre, Ankara pour rencontrer le président turc pour la deuxième fois en moins d’un mois. Tayyip Recip Erdogan a déclaré que la Turquie était prête à envoyer des troupes d’intervention rapide en Libye si le GNA en fait la demande. Erdogan considère Haftar comme « un leader non légitime ». Tripoli et Ankara ont signé un accord de coopération sécuritaire fin novembre 2019. Ankara, qui ne soutient pas Haftar, s’est engagé de livrer des munitions à Tripoli, de contribuer à la formation des soldats et d’assurer un échange d’informations militaires sensibles. Ankara a signé un autre mémorandum avec Tripoli sur la délimitation maritime. Cet accord permet à la Turquie de pousser des explorations gazières en Méditerranée loin de ses frontières. Cela n’a pas plu à la Grèce en conflit avec Ankara sur l’île de Chypre mais aussi sur les forages menés en mer actuellement. En représailles, Athènes a chassé l’ambassadeur de Libye. Le Caire n’a pas apprécié également la signature de cet accord qui donne un droit de regard à Ankara sur les recherches sur les hydrocarbures en Méditerranée orientale à fort potentiel, selon les experts.
La Tunisie renforce la présence militaire au niveau des frontières avec la Libye
Fayez Al Sarraj s’est déplacé aussi à Doha où l’Emir du Qatar Tamim Ben Hamed Al Thani l’a assuré du soutien de son pays dans les domaines sécuritaires et économiques. Doha considère l’attaque programmée de Khalifa Haftar sur Tripoli « d’agression ». Dans la région du Golfe, Haftar compte surtout sur l’appui logistique des Emirats arabes unis au nom de « la lutte contre le terrorisme ». Avant d’annoncer le lancement prochain de sa « bataille décisive » à Tripoli, Khalifa Haftar, qui tente de contrôler la capitale libyenne depuis avril 2019, a rendu une visite secrète au Caire et a eu des discussions avec des conseillers en questions sécuritaire du président américain Donald Trump. Des médias libyens hostiles à Haftar ont rapporté que le général de Benghazi s’appuierait sur des miliciens soudanais et tchadiens et des mercenaires russes pour ses batailles militaires à Tripoli alors que les adversaires du GNA parlent d’un soutien logistique qatari aux troupes qui défendent le gouvernement Al Saraj.Par crainte de débordements ou de complications, la Tunisie voisine a envoyé des renforts militaires à ses frontières Sud avec renforcement de moyens de surveillance électronique.