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Benjamin Stora fait le bilan des avancées mémorielles franco-algériennes, mais des défis restent

Radio M | 21/05/24 17:05

Benjamin Stora fait le bilan des avancées mémorielles franco-algériennes, mais des défis restent

La Commission mixte d’historiens franco-algérienne, présidée par Mohamed Lahcen Zeghidi côté algérien et Benjamin Stora côté français, se réunit à Alger du 20 au 24 mai pour une nouvelle session de travail. Dans un entretien avec la radio algérienne, M. Stora a dressé un bilan des progrès réalisés jusqu’à présent et des défis à venir.

L’historien a souligné que leur mission porte “avant tout sur la conquête coloniale, sur la pénétration coloniale au XIXe siècle”. Un travail minutieux visant à “établir ensemble une chronologie des massacres, des déplacements de populations, des possessions foncières” qui ont marqué cette période trouble de l’histoire algérienne.

Parmi les avancées notables, M. Stora a évoqué la numérisation d’environ “2 millions de documents” d’archives en France. Cependant, le dossier épineux de la restitution des documents originaux reste à régler. “Pour cela, en France, il faut une loi qui soit votée par l’Assemblée nationale et le Sénat”, a-t-il expliqué, ajoutant qu’un projet de loi est en préparation pour permettre ces restitutions, pas seulement envers l’Algérie mais aussi d’autres pays africains.

En attendant l’adoption de ce texte législatif, l’historien préconise “qu’il y ait des gestes” symboliques, notamment autour de la figure emblématique de l’émir Abdelkader. “J’ai toujours souhaité qu’il y ait des restitutions qui soient faites, autour notamment des épées de l’émir, ses vêtements, de son burnous en particulier, et puis de ses textes religieux, de son Coran en particulier”, a plaidé M. Stora.

Interrogé sur la reconnaissance des crimes coloniaux, comme les massacres du 8 mai 1945, l’historien a rappelé son rôle précurseur en évoquant dès 1978 ces événements tragiques dans sa biographie de Messali Hadj. “C’est un travail qu’il faut faire, historien, historique, qui est tout à fait indispensable. Il faut sortir des généralités et aller vers un travail précis”, a-t-il insisté.

Tout en faisant le point sur les progrès réalisés dans le cadre du travail mémoriel, Benjamin Stora a également porté son regard sur les défis à venir dans la relation bilatérale. L’historien voit dans une potentielle visite officielle du président algérien en France “une nouvelle occasion pour discuter de la question mémorielle et de l’avenir des relations”bilatérales. “Il y a à la fois cette occasion de reconnaissance du passé colonial (…) mais aussi cette visite, c’est de regarder vers l’avenir”, a-t-il estimé, citant les dossiers du partenariat économique, de l’immigration ou encore de la géopolitique en Méditerranée.

Cependant, l’absence de clarté sur les intentions de Tebboune de se représenter à la prochaine élection présidentielle jette une ombre sur la concrétisation d’un tel déplacement dans l’immédiat.