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Coronavirus : Comment la faiblesse du dépistage fausse le taux de mortalité en Algérie

Ghada Hamrouche | 12/04/20 14:04

Coronavirus : Comment la faiblesse du dépistage fausse le taux de mortalité en Algérie

L’Algérie enregistre le taux de mortalité le plus élevé au monde du Coronavirus par rapport au nombre de malades déclarés. Au dernier bilan, communiqué samedi 11 avril par le Comité scientifique de suivi de l’évolution de la pandémie, 275 personnes sont décédées sur les 1825 cas confirmés, soit un taux de 15,06 %. A titre de comparaison, ce taux est de 3,8 % aux Etats Unis, le pays le plus touché par le Covid-19. Il est de 10,18 % en Espagne, 12,7 en Italie, 7,2 % au Maroc, 1 % en Afrique du Sud et 0,8 % en Russie. Comment expliquer ce taux élevé de mortalité? «  Parce que nos capacités de dépistage sont trop faibles. Cela ne reflète pas la situation épidémique par rapport au nombre de cas qui devrait être recensés. Les autorités sanitaires le reconnaissent. Les chiffres qu’on donne officiellement par rapport aux cas confirmés, c’est à dire ceux qui ont pu être prélevés et diagnostiqués à travers l’examen biologique, sont loin de la réalité du terrain. Autour de chaque cas positif, il faut compter quatre ou cinq cas qui auraient été atteints par le virus», a expliqué à Radio M Post Lyes Merabet, médecin et président du Syndicat national des praticiens de la santé publiqu (SNPSP). Il a souhaité que la cadence du dépistage augmente dans le pays avec l’ouverture d’annexes de l’Institut Pasteur à Chlef, Ouargla, Oran, Constantine et, bientôt, Tamanrasset. « Les pouvoirs publics ont décidé l’ouverture d’annexes régionales pour atténuer la pression sur le laboratoire de référence relevant de l’Institut Pasteur d’Alger », a déclaré Abderrahmane Benbouzid, ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière.

5000 dépistages en Algérie en quarante jours

« Non seulement, il faut avoir des laboratoires qualifiés pour faire ce genre d’examens, mais aussi de réactifs et de kits de prélèvement. L’Algérie est entrain d’importer ces kits de Chine. J’espère qu’ils seront rapidement mis à la disposition des laboratoires pour accélérer la vitesse. D’autre part, nous avons enregistré des retards pour valider les tests rapides à utiliser pour les personnels de la santé et les sujets contact de premier niveau autour des cas confirmés. On vient de donner l’aval pour utiliser ces tests rapides. Avec ces deux éléments mis au niveau de la démarche diagnostic, on va constater que le nombre de cas confirmés serait nettement plus élevé par rapport à ce que nous sommes entrain de calculer aujourd’hui », a détaillé Lyes Merabet. Il a cité l’exemple de l’Allemagne en matière de dépistage. « L’Allemagne a opté pour le dépistage massif. Ils sont arrivés jusqu’à 500.000 dépistages par semaine. En Algérie, en quarante jours, nous avons fait à peine 5000 tests, avec une moyenne de 110 tests par jour. C’est très peu. Ailleurs, la moyenne est de 10.000 à 20.000 tests par jour. Comparé à l’Italie ou à l’Espagne, le taux de mortalité est plus faible en Allemagne rapporté au nombre de cas confirmés(2,28 %)», a-t-il appuyé.

« Plus le nombre de décès baisse, plus on est rassuré »

Dans une déclaration à la Chaîne 3 de la Radio nationale, ce dimanche 12 avril, le ministre de la Santé a soutenu qu’il ne faut pas parler de baisse de cas confirmés en Algérie à l’heure actuelle. « La baisse n’est pas durable pour le moment. Nous sommes à un chiffre qui nous n’alerte pas. On était en montée de la pente. Je vous le dis et répète que ce sont les décès qui sont importants parce que les chiffres positifs sont ce que sont les positifs. Et, dans les endroits où il n’y a pas de tests, il n’y a pas de positifs. Il y a qui sont des porteurs sains qui diffusent le virus, sont infectants. Les décès sont identifiés par les services de santé et ceux de l’Intérieur (ministère).Nous nous accordons sur les chiffres. Plus le nombre de décès baisse, plus on est rassuré. A limité, si tous on fait le Coronavirus, sans en mourir, ce n’est pas grave. Dans 80 % des cas, le Covid-19 n’est pas mortel. Il est vécu comme une grippe. Donc, ce sont les chiffres des décès et de ceux qui passent en réanimation qui sont considérés », a précisé Abderrahmane Benbouzid. Jeudi 7 avril, il a déclaré que l’Algérie a opté pour « la transparence » dans la communication des données liées au nombre de contaminations et de décès dus au Coronavirus. « Certains pays européens ne déclarent pas les morts en dehors des structures hospitalières, tandis que d’autres ne font pas de tests pour le coronavirus. Partout, il y a une sorte de confusion et en Algérie, nous avons opté pour la transparence. Les chiffres de décès paraissent élevés, car nous avions, dès le début, pris en compte des décès naturels qui n’étaient pas forcément liés au coronavirus« , a-t-il déclaré à l’APS.