Le directeur général du Trésor algérien a déclaré lundi que la dette publique du pays « ne dépasse pas 47% du PIB », un niveau jugé sous contrôle. Des experts mettent cependant en garde contre les risques d’une augmentation de l’endettement.
Dans un entretien télévisé lundi, le directeur général du Trésor algérien, Hadj Mohamed Sbaa, s’est voulu rassurant concernant le niveau de la dette publique du pays. Celle-ci « ne dépasse pas les 47% du produit intérieur brut », a-t-il affirmé.
Néanmoins, M. Sbaa occulte le fait que la dette a explosé ces dernières années, passant de 45,6% du PIB en 2019 à 51,4% en 2020. Une augmentation vertigineuse qui jette le doute sur l’optimisme affiché.
M. Sbaa estime qu’il est « préférable que l’Algérie ait des dettes intérieures qu’extérieures, car plus facile à contrôler », faisant référence aux emprunts contractés auprès des institutions nationales plutôt que des bailleurs de fonds étrangers.
Le déficit du Trésor était inférieur à 10% du PIB en 2023, a-t-il également précisé, jugeant que les dépenses liées aux augmentations des salaires et des retraites « n’affecteront pas l’équilibre ».
Des prévisions moins optimistes
Ces déclarations optimistes contrastent avec les récentes prévisions de la Banque mondiale. Celle-ci estime en effet que la dette publique algérienne devrait continuer à grimper dans les prochaines années, pour atteindre 65,3% du PIB en 2023.
La Banque Mondiale met en garde contre les effets de la crise sanitaire, ayant entraîné une « dégradation majeure des déficits ». D’autres experts appellent également à la prudence. « Actuellement, le ratio dette publique/PIB frôle les 50%. Bien au-delà du plafond des 40% préconisé par nombre d’institutions financières internationales. À ce stade, chaque point de PIB supplémentaire creuse un peu plus l’ornière des finances publiques », rappellent-ils. Peu importe que la dette soit intérieure ou extérieure.
Un usage discutable des fonds
L’efficacité de l’endettement pose en effet question. Certains économistes soulignent « l’existence d’un problème réel dans l’utilisation des ressources »obtenues. Autrement dit, les capitaux empruntés serviraient davantage à « boucher les trous » qu’à financer des investissements productifs.
Le cercle vicieux de l’endettement excessif est connu : des taux d’intérêt élevés grèvent les budgets, le service de la dette limite les ressources disponibles pour l’investissement productif, la croissance s’en ressent, creusant un peu plus les déficits.
Selon nos interlocuteurs, l’Algérie doit impérativement enrayer cette spirale négative. Un effort budgétaire drastique s’impose pour assainir les comptes publics. « Cela suppose à minima de diviser par deux le déficit structurel, en limitant les dépenses courantes », expliquent-ils.
Simultanément, le pays devra mettre en place une politique de croissance verte, digitale et inclusive, afin de doper son PIB. « L’effet combiné permettra mécaniquement de réduire le ratio dette/PIB à un niveau soutenable inférieur à 40% », ajoute-t-on.
Certes, la tâche s’annonce herculéenne. Mais entre les injonctions du FMI et les impératifs de justice sociale, l’Algérie n’a guère le choix. Redresser la barre budgétaire est le préalable à toute reprise économique digne de ce nom.