Proposition de loi contre l’accord de 68 : l'ombre de l'OAS resurgit à l'Assemblée - Radio M

Radio M

Proposition de loi contre l’accord de 68 : l’ombre de l’OAS resurgit à l’Assemblée

Radio M | 09/12/23 13:12

Proposition de loi contre l’accord de 68 : l’ombre de l’OAS resurgit à l’Assemblée

L’Assemblée nationale a rejeté cette semaine une proposition de loi visant à dénoncer l’accord migratoire franco-algérien de 1968. Ce texte controversé était porté par la députée Les Républicains Michele Tabarot, fille de Robert Tabarot, ancien membre de l’OAS et du Front Algérie Française pendant la guerre d’Algérie.

Il était une fois Robert Tabarot, boxeur professionnel reconverti dans le commerce en Algérie. Engagé aux côtés des ultras de l’Algérie française, il fut un des chefs de la sinistre OAS à Oran, responsable de nombreuses exactions contre les indépendantistes algériens. 

Un demi-siècle plus tard, sa fille Michele reprend le flambeau, mais sur le terrain politique cette fois. Députée LR des Alpes-Maritimes, elle défend bec et ongles une vision assimilationniste de l’immigration, n’hésitant pas à cibler nommément la communauté algérienne. 

Avec sa proposition de loi visant à dénoncer l’accord migratoire franco-algérien de 1968, elle pensait sans doute faire d’une pierre deux coups : satisfaire une partie de l’électorat de droite hostile à l’immigration maghrébine, tout en liquidant un traité honni par les rapatriés d’Algérie qui constituaient la base électorale de son père.

Las, son origine familiale controversée lui a valu un retour de bâton cinglant. Les députés de gauche ont dénoncé une forme d’instrumentalisation politicienne d’un douloureux passé que la France n’a jamais fini de panser. La députée écologiste Sabrina Sebaihi a notamment accusé Mme Tabarot de porter un texte « applaudi par les héritiers des tortionnaires de l’Algérie ». Des accusations rejetées par l’intéressée, qui affirme mener ce combat pour des raisons strictement migratoires et sans lien avec le passé de son père. « Tant que l’accord franco-algérien de 1968 ne sera pas dénoncé, nous ne retrouverons jamais une capacité totale à maîtriser les flux migratoires », affirme-t-elle. « Il instaure un droit quasi-automatique à l’immigration», ajoute-t-elle. 

Derrière cette polémique éclate pourtant des vérités qui dérangent. Sur les bancs du Rassemblement National comme dans certains rangs LR, l’ombre de l’Algérie française plane toujours. La blessure de 1962 reste vive pour les rapatriés, qui transmettent parfois une rancœur tenace à leurs descendants. 

De cette histoire tourmentée, il semble que la France et l’Algérie sont incapables, 60 ans plus tard, de faire table rase. Entre la tentation du déni et la réécriture complaisante du passé, le travail de mémoire reste encore largement à accomplir des deux côtés de la Méditerranée. Faute de quoi, le lourd héritage algérien ne cessera de ressurgir au moindre accroc entre Paris et Alger.