Quatre ans jour pour jour après sa mort, le général Ahmed Gaïd Salah semble être tombé dans l’oubli. Pourtant, ce chef d’état-major auto-proclamé artisan de « l’Algérie nouvelle » avait réussi en quelques mois à mettre fin, dans le sillage du Hirak, à 20 ans de règne Bouteflika avant d’organiser une élection présidentielle censée marquer l’avènement d’une nouvelle ère. Mais aujourd’hui, son héritage politique apparaît bien ténu.
Si Gaïd Salah a posé lui-même les fondations de cette « Algérie nouvelle » tant promise, son successeur Saïd Chengriha, qu’il avait adoubé et placé à la tête de l’armée, semble s’employer à gommer toute trace de son influence. Chengriha et le président Tebboune, que Gaïd Salah avait fait roi, traitent désormais la mémoire du défunt général comme un héritage encombrant.
Les fils Gaïd Salah, Boumediene et Adel, déjà sous le coup d’une interdiction de sortie du territoire, après avoir bénéficié d’un non-lieu lors de l’arrivée de Tebboune au pouvoir, semblent aujourd’hui dans le viseur de la justice. L’aura de leur père encombrant ne semble désormais plus impressionner grand monde dans les hautes sphères militaro-politiques.
Ce dédain affiché tranche singulièrement avec le culte voué par le régime à d’autres figures historiques de l’armée, comme Boumediène ou Nezzar, dont l’héritage est abondamment revendiqué. L’artisan autoproclamé de l’« Algérie nouvelle », qui espérait probablement entrer à son tour au panthéon en pilotant la transition post-Bouteflika, est déjà relégué dans les oubliettes de l’histoire.
Son legs se résume finalement à l’avènement d’un nouveau régime militaire, aussi ingrat avec son créateur présumé et désireux d’asseoir sa propre légitimité en rompant avec l’ère Gaïd Salah. Quatre ans après sa mort, l’homme fort d’hier est devenu une image gênante pour les puissants d’aujourd’hui, impatients de tourner la page. L’histoire est décidément ironique pour celui qui prétendait la façonner à son goût.