Texte : Dalila MORSLY, universitaire
Poème : Souad LABBIZE, écrivaine
Dessins : Ali SILEM, artiste-peintre
Je ne connais pas Khaled Drareni. Je veux dire : je ne l’ai jamais rencontré… Et pourtant je le connais.
En feuilletant avec une attention scrupuleuse les nombreux albums photos ou vidéos consacrés aux marches du hirak, je l’ai repéré : le regard tantôt direct tantôt protégé de lunettes noires, le poing levé ou la main formant le V de la victoire, il fixe pour l’histoire des instantanés de la révolution du sourire.
En lisant les tweets qu’il poste chaque jour en anglais, en arabe ou en français, j’ai découvert des images magiques : un homme écrit en bleu sur un mur blanc la promesse : « Hirak. On reviendra après Covid 19 » ; un mur de Blida porte l’inscription en arabe : « le Corona ne détruira pas la ville de Blida » et la ville des roses est symboliquement figurée par le dessin d’une rose rouge ; un marcheur porte une pancarte : « Notre révolution est une question de dignité ».
Ses choix sont percutants, poétiques.

Au fil des photos, des vidéos le portrait d’un journaliste tranquille, scrupuleux prend forme : les CPP (Radio M) qu’il anime et où le respect de la parole des invités est de règle en témoignent, tout comme l’entretien qu’il accorde, à Lynda Abbou, après sa première arrestation.
Il appartient à l’humanité qui ne plie pas : à la juge qui lui propose de s’asseoir il répond : « je reste debout, je suis toujours debout », reprenant en quelque sorte les propos de ses frères en incarcération. Nazim Hikmet : « Être captif, là n’est pas la question. Il s’agit de ne pas se rendre : voilà », ou Abdellatif Laâbi : « Je n’ai pas connu l’enfermement absolu puisque la partie libre de moi-même restait agissante » et tant d’autres. Il sait, ils savent que « la pensée a des ailes et que nul ne peut arrêter son vol », comme le clame un personnage du film de Youcef Chahine, Le destin. Il sait, ils savent que la pensée, les idées passent les mu- railles et nous arrivent inéluctablement.
Mokrane Aït Larbi a raison d’écrire que Khaled Drareni est « l’honneur de la presse algérienne » et qu’il a « déjà gagné la partie ».Il est l’honneur de la presse algérienne, il est notre honneur, le peuple ne s’y est pas trompé qui lui a remis le titre de « meilleur journaliste du peuple ».
On ne garde pas en prison le meilleur journaliste du peuple. Libération!
Dalila Morsly

Tu n’as jamais eu
la carte qu’il faut
parti unique
coopérative
club des Pins
d’handicap
d’identitéde retrait
de presse
d’embarquementde séjourune carte te manque
dans le jeu des familles
qui cachent tes cartes
dans le tiroir sans fond
Souad Labbize

En solidarité avec notre collègue Khaled Drareni et tous les détenus d’opinion en Algérie, RadioM dédie l’espace “Message in a Bottle” aux lettres et contributions destinées aux détenus d’opinion. Si vous souhaitez publier dans cet espace, envoyez nous votre contribution par email, dans la langue de votre choix, à : daikhayasqot@gmail.com