Presque un mois depuis l’arrestation du journaliste El-Kadi Ihsane et la mise sous scellés de ses médias, Radio M et Maghreb-Emergent. Des voix s’élèvent tous les jours pour dénoncer une détention arbitraire. Dernière en date celle de l’ONG MENA Rights Group.
MENA Rights Group sollicite l’intervention de l’Office des normes internationales et des affaires juridiques de l’UNESCO.
Sur son site, l’ONG de plaidoyer basée à Genève, informe de la procédure engagée le 17 janvier 2023 en faveur du journaliste et auprès de la direction générale de l’unesco à travers son service. Il défend d’une part, la liberté d’expression, un droit fondamental et une condition essentielle pour la démocratie et le développement, servant de laboratoire d’idées, il soutient d’autre part, les pays pour adopter des normes internationales et gère des programmes pour la libre circulation des idées.
Ses avis juridiques centralisés et indépendants sont présentés à la Conférence générale de l’UNESCO, au Conseil exécutif et aux autres organes intergouvernementaux, en vertu des conventions qui lient les pays à cette organisation.
Dans son compte rendu, MENA Rights Group qui défend et promeut les libertés et droits fondamentaux dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, publie une chronologie des évènements dans l’affaire El Kadi Ihsane.
En trois ans, écrit l’ONG, il a été poursuivi dans le cadre de quatre affaires distinctes.
Un «acharnement judiciaire», souligne l’organisation qui cite
les soutiens du journaliste.
Suite à un article d’opinion publié sur le site de Radio M le 23 mars 2021 appelant à l’inclusion de tous les courants idéologiques dans le Hirak y compris du mouvement Rachad , le ministre de la communication de l’époque, Amar Belhimer, avait engagé des poursuites pour « diffusion de fausses informations à même de porter atteinte à l’unité nationale »,
«perturbations des élections» et«réouverture du dossier de la tragédie nationale». El Kadi a été placé sous contrôle judiciaire mardi 18 mai par le juge d’instruction près le tribunal de Sidi M’hamed, souligne l’ONG et de poursuivre… « El Kadi a été arbitrairement interpellé par les services de sécurité à la sortie de son bureau à Alger-centre, le 10 juin 2021 », à la veille des élections législatives. Interrogé à la caserne de Antar et libéré 30 heures après, « un acte de répression contre les droits à la liberté d’expression et d’association à l’approche d’élections législatives contestées » les rédacteurs s’appuient sur les rapports d’Amnesty International.
MENA Rights Group déroule encore:
« Le 24 février 2022, El Kadi est cité, sans être arrêté, dans le dossier de l’activiste Zaki Hannache suite à la présentation de ce dernier devant le juge d’instruction du tribunal de Sidi M’hamed ».
Dans une autre procédure, amplifie l’ONG, » El Kadi a été informé le 20 mars 2022 qu’il était poursuivi pour appartenance à une organisation terroriste » suite à une audition en liberté devant le juge d’instruction du tribunal de Larbâa Nath Irathen, dans la wilaya de Tizi Ouzou. Le dossier a été transféré ensuite au tribunal de Sidi M’hamed.
Dans la Chronologie rédigée à l’Office des normes internationales et des affaires juridiques de l’UNESCO, nous pouvons lire le verdict dans l’affaire engagée par l’ancien ministre de la Communication contre El Kadi. Le 7 juin 2022, il est condamné à six mois de prison ferme et à 50 000 Dinars d’amende (≃320 Euros).
« Même si la peine n’a pas été accompagnée d’un mandat de dépôt, cette condamnation va notamment à l’encontre de l’article 54 de la Constitution algérienne de 2020 qui prévoit que le délit de presse ne peut être sanctionné par une peine privative de liberté». Commente l’ONG.
Le 17 novembre 2022, » les différentes accusations de terrorisme visant El Kadi ont toutes été abandonnées », informe t-elle avant d’aggraver la situation
« Dans la nuit du 23 au 24 décembre 2022, après minuit, des membres de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ont arrêté El Kadi. Le lendemain, le siège d’Interface Médias, a été perquisitionné et mis sous scellés, le 29 décembre , le parquet a annoncé le placement d’El Kadi en détention provisoire ».
Les chefs d’accusation sont énoncés «réception de fonds d’une source étrangère à des fins de propagande politique», «réception de fonds et d’avantages d’organismes et de personnes de l’intérieur du pays et de l’étranger dans l’intention de commettre des actes susceptibles d’attenter à la sécurité et à la stabilité de l’Etat, à l’unité nationale et à l’intégrité territoriale » et «publication au grand public de contenus de nature à nuire à l’intérêt national et collecte de dons sans autorisation ».
Ces poursuites constituent la quatrième affaire visant El Kadi, renseigne les rapporteurs auprès de l’UNESCO qui concluent par le demande de libération provisoire des avocats le 2 janvier 2023. Prévue le 18 janvier, ajournée à une date antérieure le 15 janvier, « la chambre d’accusation de la Cour d’Alger a décidé de maintenir El Kadi en détention provisoire, ni El Kadi, ni ses avocats n’ont assisté à cette audience faute d’avoir été prévenus préalablement » . Une violation de trop, « flagrante » dénonce MENA Rights Group. Une « violation des dispositions constitutionnelles, du Code de procédure pénale et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, une violation du droit du journaliste, provisoirement incarcéré, à un procès équitable, et un manque de respect par l’exclusion de l’équipe de la défense en tant que partenaire essentiel dans la quête de la justice », détaille l’ONG qui rappelle la condamnation du collectif de la défense.
El Kadi Ihsane, en détention provisoire au centre pénitentiaire d’El-Harrach est privé de liberté depuis le 24 décembre 2022.